La Légende d'Eusébie

D'après un scénario original de Robert Pousseur

Texte et Illustrations Marie-Pascale Saison

 

«Troublant l'ordre public de la cité, Quentin est arrêté à Samarobriva (Amiens). Les mains liées, il est traîné par quatre soldats à destination d'Augusta Viromanduarum (Saint-Quentin).

A chaque faux pas les hommes le rouent de coups. Arrivés dans le bourg, ils le jettent dans un cachot. J'ai assisté impuissant et désespéré à son martyr.»

 

 ...«Quelques jours plus tard, j'ai entendu les verrous grincer, la lourde porte s'ouvrir.

D'autres soldats l'encadraient avec rudesse pour le présenter au dignitaire romain, le fameux Rictiovare!

Avec conviction, Quentin répondait à chaque question.

Il parlait de la liberté de l'âme, disait être "un enfant de Dieu".

Rictiovare, irrité, a ordonné le fouet.

 

Les soldats l'ont conduit sans ménagement tout au fond d'un cachot.

       Je crois même qu'ils ont étendu de l'huile bouillante sur tout son corps. L'agacement du préfet des Gaules est à son comble, pourquoi cet opiniâtre cherche-t-il à soulever le peuple contre Rome? 

       Rictiovare, sans cesse, le harcèle de questions. 

Quelques jours plus tard, la porte déverrouillée m'a laissé entrevoir Quentin. Quelle lueur singulière dans ses yeux.

 

Les soldats l'ont poussé avec violence jusqu'au marais et deux d'entre eux ont reçu l'ordre d'aller chercher de longues broches à Marteville, bourg voisin d'Augusta Viromanduorum, spécialisé dans le fer à forger. Tandis que ses tortionnaires préparaient un grand feu, Quentin proclamait sa foi avec force. Il parlait  des plus pauvres, des exclus, faisant don de tout son être à son Dieu et se disait prêt à mourir. Alors ils lui ont passé des aiguilles sous les ongles puis ont fait rougir les extrémités des broches et les lui ont enfoncées dans les épaules.

 

Je me souviens encore de cette odeur de chair brûlée cette nuit-là. 

                       Au plus fort de la torture, Quentin persévérait dans son discours.

Rictiovare était excédé.

                     ...Tout à coup, il saisit une épée qu'il lance au bourreau et, hurlant de rage, il lui ordonne de trancher la tête de Quentin. Puis les soldats jettent à la hâte son corps et sa tête parmi les joncs, là-bas dans l'eau stagnante des marais qui bordent la somme.»

 

Suite...


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