La Légende d'Eusébie
D'après un scénario original de Robert Pousseur
Texte et Illustrations Marie-Pascale Saison
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Répondant à un profond appel, elle veut recomposer le corps de Quentin dans son intégrité. Après tous ces longs jours de recherche ponctués de multiples rencontres, elle sait qu'elle a atteint maintenant le but de ses pérégrinations.
Eusébie pense intensément à cet homme. Timidement, pour la première fois, elle joint les mains et balbutie quelques mots : elle ébauche une prière dans un élan de sincérité et se laisse pénétrer ainsi par le mystère de Dieu... |
Les esclaves d'Eusébie conduisent un chariot attelé à une paire de bœufs. Ils y installent le corps et la tête de Quentin. Eusébie ne sait comment remercier le vieil homme et tous deux bénissent le ciel de s'être rencontrés. Le cortège remonte la rue d'Isle, bientôt suivi par tous les habitants du bourg. Soudain le chariot devient très lourd et les bœufs refusent d'avancer. La foule est stupéfaite. |
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C'est ce moment qu'Eusébie choisit pour proclamer : «Voici le lieu de sépulture de Quentin.» Cette dame venue de Rome, fatiguée par ce long voyage guidera encore toutes les opérations jusque dans les moindres détails. Ses hommes vident le temple construit non loin de là. Tous ensemble en une procession solennelle établissent en cet endroit le premier lieu de sépulture, digne de cet homme : Ici repose Quentin, martyr de la période sanglante en l'an 287. Dans le temple païen, la foule entoure le corps du saint et chacun reteint son souffle face au profond recueillement d'Eusébie : D'un geste empreint de gravité, elle trace le signe de la croix sur celui qu'elle a tant cherché. Elle connaîtra enfin la paix... |
Quelques siècles plus tard, Augusta prendra le nom de Saint-Quentin, mais en attendant ce jour,
les habitants du bourg d'Augusta Viromanduorum vivront des moments extraordinaires et des heures sombres.
En 406, les Francs pillent et dévastent la ville.
En 450, les habitants voient arriver avec frayeur le farouche Attila qui pille la ville et fait tout brûler.
les habitants vont s'apercevoir avec effroi que le tombeau de Saint-Quentin a disparu.
En 531, ce sont les barbares, les nouveaux envahisseurs. Tous les habitants fuient.
Quand ils reviennent, il trouvent leurs maisons brûlées, détruites.
Il faudra tout reconstruire.
En 640, l'Évêque saint Éloi organise des fouilles et retrouve le corps de Quentin ; une chapelle lui est consacrée.
De grandes cérémonies vont se dérouler autour des reliques du saint, au sommet de la colline d'Augusta.
Les pèlerins arrivent nombreux prier celui qui est venu dans la région annoncer l'amour de Jésus pour tous.
Une vénération particulière ne cesse de croître pour saint Quentin
et diverses constructions vont s'élever autour de l'église...
Au cours du IXème siècle, la cité d'Augusta et le vicus Sancti Quentini (petit bourg) se sont appelés :
Ville de Saint-Quentin
38 localités portent le nom de Saint-Quentin, attestant l'étendue de son culte.
En 1100, les Saint-Quentinois se révoltent contre ceux qui gouvernent la ville car les impôts sont trop lourds.
Ils veulent dépendre uniquement du roi qui leur accorde une certaine liberté par la Charte Communale.
Au XIIème siècle, les habitants posent la première pierre de la collégiale, construction entreprise par les chanoines et entraînant d'énormes difficultés techniques. L'élévation de cet édifice nécessitera trois siècles et restera inachevé, dépourvu de façade. (Les chrétiens en pèlerinage demandent des guérisons auprès des reliques de saint Quentin. Il est un saint "guérisseur", on s'adresse à lui pour l'hydropisie et divers maux).
En 1876, le pape Pie IX décerne à la collégiale le titre de Basilique.
Durant la guerre 1914-1918, la ville est de nouveau détruite. De la basilique il ne reste plus que les murs.
Alentour ce n'est que ruine et tristesse. Les habitants vont participer à la reconstruction de leur ville et de la basilique. Il faudra 55 ans pour que la basilique soit terminée.
En l'an 2000, il y aura 1700 ans que Quentin aura été martyrisé.
Robert POUSSEUR
Fin